lundi 11 mars 2019

Un mensonge à préserver

Le doux venin des abeilles
Auteure : Lisa O'Donnell
Couverture : Studio Piaule
Édition: Michel Lafon - 2018 - 391 p.
Traduction par Philippe Mothe
original: The Death Bees,  première publication par William Heinemann, 2012
Drame, littérature contemporaine, littérature écossaise


Présentation: Deux adolescentes enterrent leurs parents dans la cour et font croire que ceux-ci sont partis en voyage
+ : tension
- : "sans surprise"
Thèmes: pauvreté, maltraitance, drogue, adolescence


Pourquoi ce livre
Pendant mes achats pour un swap, ce livre, par son titre et sa couverture, m'a intriguée. Je lis donc le résumé, et hop dans la wish. Et c'est donc martineke qui me l'a offert dans le cadre d'un autre swap, que je remercie à nouveau. Et je l'ai donc sorti de la PAL récemment puisqu'il me faisait de l'oeil.

Mon avis
Et j'ai bien fait de l'en sortir, car j'ai bien apprécié cette lecture.

Dès le départ, on est plongé dans l'histoire, dans le fait que les parents sont enterrés dans le jardin, et on se questionne donc, qui a bien pu commettre le crime pour mener à cet enterrement? Même si, dans mon cas, je sentais poindre la vérité.

On suit donc la vie de Marnie et Nelly, adolescentes, après cet enterrement, et on en apprend aussi sur leur passé qui n'était pas tout rose, cet argent que doivent leurs parents au milieu du crime.
Peut-être que le café m'était un peu monté à la tête, mais quand je pense à ces gens qui ont livré leurs enfants à elles-mêmes, qui les ont laissées se débrouiller dans un monde froid et cruel, sans même un mot pour dire où ils allaient ni une miette à se mettre sous la dent, leur sort m'indiffère. Elles méritent mieux, ces filles. Elles se tiennent propres, travaillent bien en classe et, avec les deux plaies qu'elles ont pour parents, c'est vraiment un miracle qu'elles soient encore en vie. 
On suit donc ces deux orphelines, et on se demande, comme Marnie, comment elles pourront s'en sortir. Auront-elles assez d'argent? Combien de temps pourront-elles garder le secret par le biais du mensonge qu'elles inventent. Quand Marnie s'inquiète pour Nelly, on voit l'attachement, mais on voit aussi le fait par d'autres événements qu'elle l'envoie paître. On remarque aussi ces sentiments chez Nelly, et vu ce qu'on apprend de leur vie au fil du récit, on ne peut que les apprécier, et espérer qu'elles s'en sortent.

De plus, arrive un moment où leur voisin se rend compte qu'elles sont laissées à elles-mêmes, et les prend en quelque sorte sous son aile, voisin qui a lui aussi certains secrets, comme nous permet de l'apprendre ce roman choral. Et les fillettes utilisent leur voisin en le faisant passer pour leur oncle afin de s'éviter des troubles avec "l'aide sociale", sachant qu'elles ont besoin de l'argent puisque leurs parents ne reviendront pas. J'ai aussi bien aimé le rôle attribué au chien du voisin, puisque les adolescentes ont bien peur que celui-ci déterre les ossements et révèlent ainsi où sont cachés leurs parents.

J'ai aussi apprécié le roman choral qui, ici, bien que chaque narrateur ait un court passage, voire minuscule, donne suffisamment d'informations pour qu'on s'attache dans chaque passage vis-à-vis chaque narrateur. De plus, face à cette maltraitance, le traitement est tel que ce n'est pas de la pitié qu'on éprouve pour les fillettes, mais plutôt de la compassion, et un espoir face à leur avenir. Pour savoir si l'espoir est vain ou non, vous devrez vous le procurer.

Aussi, au moment d'écrire cette chronique peu de jours après avoir terminé ma lecture, je voyais déjà que mon souvenir s'estompait beaucoup alors que j'avais adoré ma lecture, et je m'en suis demandée la raison. C'est là que j'ai réalisé que c'est probablement parce qu'il n'y a pas de revirements à nous faire demander ce qu'on avait zappé, pas de réelles grosses surprises, même si certaines situations peuvent nous paraître un peu moins convenues. C'est ce que je vois qui expliquerait ce sentiment dans mon cas. N'empêche que, vous l'avez sans doute compris, j'ai adoré cette lecture, et cette plume que j'ai trouvé juste, émouvante. Alors, n'hésitez pas s'il vous tente!


Quelques citations
Les oiseaux chantent encore, la musique est là, toujours. Ma vie continue tandis qu'une autre se retire.
La mort, nous l'avons déjà vue, Marnie et moi, ce monceau de glace qui fond au fil des jours, ces gouttes d'eau qui gèlent sur notre âme pour, à chaque instant, nous remémorer ce qui a disparu, mais le désespoir qui nous assaille aujourd'hui est une peine qui imprègne de ténèbres la moindre de nos fibres.
Elle ne viendra pas, l'heure de lui dire adieu. Il ne viendra pas, le point final. Le voilà qui glisse vers l'apaisement, il nous quitte et j'ai beau chercher du courage en le voyant partir, je suis terrassée de larmes, mais je me dois de les cacher car il nous lègue un mensonge à préserver, un mensonge inventé pour nous sauver.
Peut-être que le café m'était un peu monté à la tête, mais quand je pense à ces gens qui ont livré leurs enfants à elles-mêmes, qui les ont laissées se débrouiller dans un monde froid et cruel, sans même un mot pour dire où ils allaient ni une miette à se mettre sous la dent, leur sort m'indiffère. Elles méritent mieux, ces filles. Elles se tiennent propres, travaillent bien en classe et, avec les deux plaies qu'elles ont pour parents, c'est vraiment un miracle qu'elles soient encore en vie. Les enfants méritent d'être aimés et, quand on ne sait pas aimer, on ne devrait pas en avoir. En entendant cela, Marnie est devenue toute pâle et j'ai alors compris que je l'avais blessée. À bien y réfléchir, il ne m'était évidemment jamais venu à l'esprit qu'on puisse aimer des êtres aussi calamiteux, que Marnie les aimait, que Nelly pouvait les aimer et se faire aimer en retour.
Pauvre petite, elle est déboussolée mais, si on cherche à l'aider, on sait qu'elle va se verrouiller à double tour, alors qu'il faudrait qu'elle s'ouvre pour qu'on puisse la réconforter quand elle sature, quand elle est trop fatiguée pour faire encore semblant. Elle est manifestement à la recherche d'une figure paternelle, d'amour aussi, peut-être; mais elle ne frappe pas aux bonnes portes, presque volontairement d'ailleurs. C'est sûrement pour ça qu'elle est d'abord allée vers lui, pour chercher de la douleur, nourrir le dégoût qui est en elle. J'ai peur pour elle, comme s'il y avait dans cette jeune pousse une pourriture qui lui dévorait l'âme, qui grignotait tout ce qui est en germe à l'intérieur; heureusement pour elle, je suis un peu horticulteur et je sais que cette pourriture-là, elle se traite. À condition de tomber entre de bonnes mains, bien sûr.
J'ai peur de la mort, j'ai toujours eu peur de la mort. Elle arrive comme un grand vent, et toujours par effraction. J'allais de nouveau la croiser aujourd'hui. 

Parce que je participe à quelques challenges

Terre du milieu
Défi-lecture: #28
Challenge personnel : #14
 Multi-défis : #28
 


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