Auteure : Delphine de Vigan
Couverture : Frédéric Pierret
Édition: Le livre de Poche - 2016 - 403 p.
original: Jean-Claude Lattès , 2011
Biographie, essai, littérature française
Présentation: Delphine de Vigan interroge le passé de sa mère, pour mieux la comprendre, ainsi que ce qu'ils appellent la malédiction familiale.
+ : style
- : aura de mystère
Thèmes: bipolarité, suicide, famille
Je ne sais plus pourquoi ce livre est atterri dans ma wish puisque je sais que je lis peu de biographies. Peut-être qu'à l'époque, c'est le côté bipolarité et suicide qui m'avait attiré sans que je sache qu'il s'agissait d'une biographie. Et heureusement que je ne savais pas ce côté, car je n'aurais probablement jamais découvert ce titre émouvant si je l'avais su.
Delphine de Vigan tente de comprendre la famille de sa mère. Et dès les premières pages, on est conquis par la plume de DeVigan, et on s'attache à la famille, et on se questionne sur quels sont les événements.
Ainsi, Delphine interroge-t-elle oncles et tantes, et autres personnages de l'entourage de sa mère, à la recherche d'explication, d'origine de la douleur, de la compréhension de la souffrance.
Delphine de Vigan tente de comprendre la famille de sa mère. Et dès les premières pages, on est conquis par la plume de DeVigan, et on s'attache à la famille, et on se questionne sur quels sont les événements.
Ainsi, Delphine interroge-t-elle oncles et tantes, et autres personnages de l'entourage de sa mère, à la recherche d'explication, d'origine de la douleur, de la compréhension de la souffrance.
Mais je sais aussi qu'à travers l'écriture je cherche l'origine de sa souffrance, comme s'il existait un moment précis où le noyau de sa personne eut été entamé d'une manière définitive et irréparable, et je ne peux ignorer combien cette quête, non contente d'être difficile, est vaine. C'est a travers ce prisme que j'ai interrogé ses frères et sœurs, dont la douleur, pour certains, fut au moins aussi visible que celle de ma mère, que je les ai questionné avec la même détermination, avide de détails, à l'affût en quelque sorte d'une cause objective qui m'échappe à mesure que je crois l'approcher.Aussi, à travers cette recherche, il n'empêche pas que l'auteure a des doutes, se questionne.
Pourtant, toute tentative d'explication est vouée à l'échec. Ainsi devrai-je me contenter d'en écrire des bribes, des fragments, des hypothèses.
L'écriture ne peut rien. Tout au plus permet-elle de poser les questions et d'interroger la mémoire.
Au lieu de quoi je ne peux toucher à rien. Au lieu de quoi il me semble que je reste des heures les mains en l'air, les manches remontées jusqu'au coude, ficelé dans un horrible tablier de bouchère, terrorisée à l'idée de trahir l'histoire, de me tromper dans les dates, les lieux, les âges, au lieu de quoi je crains d'échouer dans la construction ce récit tel que je l'avais envisagée.C'est donc la quête de l'auteure de trouver la vérité qu'on suit pendant qu'elle nous raconte le passé de Lucile. Et lorsque de Vigan rassemble les éléments pour établir sa vérité, celle qui lui semble le plus plausible, elle mentionne d'autres théories, qui parfois nous semblent irréelles. Je pense entre autres aux différents souvenirs qu'elle récoltait face à un événement menant à un désastre.
En fouillant le passé de Lucile, de Vigan nous amène à découvrir une famille déchirée par de nombreux drames, au point que la famille appelle cela sa mythologie. Divers drames dont elle récolte les souvenirs par le biais de ceux de l'entourage de sa mère, dont les siens, bien qu'elle ait choisi de ne pas interroger certaines personnes. On ressent donc la tension et la pression, ces morts dramatiques, et dans mon cas, j'ai pleuré et ragé sur ce titre.
Que s'est-il passé, en raison de quel désordre, de quel poison silencieux ? La mort des enfants suffit-elle à expliquer la faille, les failles? Car les années qui ont suivi ne peuvent se raconter sans les mots drame, alcool, folie, suicides, qui composent notre lexique familial au même titre que les mots fêtes, grand écart et ski nautique.
Cette fois je ne pus rien ignorer de la douleur qui ravageait ma famille, elle saturait l'air comme de la poudre d'explosifs.Bien sûr, avec tous ces drames, il est parfois difficile de savoir la vérité. Mais c'est aussi une force du récit de ne pas nous faire sentir les éléments comme des fragments épars.
De plus, j'ai aimé que le processus d'écriture de l'auteure ne soit pas tout rose, ni tout noir, et que son cheminement me fasse penser, avec recul, au pardon.
La difficulté que j'éprouve à raconter Lucille n'est pas si éloignée du désarroi que nous éprouvions, enfants ou adolescentes, lorsqu'elle disparaissait. Je suis dans la même position d'attente, j'ignore où elle est, ce qu'elle fabrique, cette fois encore ces heures échappent récit et je ne peux que mesurer l'étendue de l'énigme.
J'ai lu et relu la pudeur de Lucile, cette élégance qui consiste à mêler le prosaïque à la douleur, l'anecdote à l'essentiel. Cette lettre lui ressemble et je sais aujourd'hui combien elle nous a transmis à l'une comme à l'autre cette capacité à s'emparer du dérisoire, du trivial, pour tenter de s'élever au-dessus des brouillards.Bref, c'est donc une lecture émouvante au coeur d'une famille touchée par de nombreux drames dans laquelle on plonge. Bref, même si vous ne lisez pas de biographie, n'hésitez pas à vous le procurer puisque bien qu'on le sache, celle-ci vient nous atteindre et nous questionner sur la vie. Bref, une première rencontre avec de Vigan qui est réussie pour moi.
Quelques citations
Des années plus tard, sa mère raconterait cette attraction que Lucile exerçait sur les gens, ce mélange de beauté et d'absence, cette façon qu'elle avait de soutenir le regard, perdue dans ses pensées.
Des années plus tard là, Carole Lucile elle-même serait morte, bien avant d'être une vieille dame, on retrouverait dans ses affaires les images publicitaires d'une petite fille souriante et naturelle.
Des années plus tard, quand il s'agirait de vider l'appartement de Lucile, on découvrirait au fond d'un tiroir une pellicule entière de photos du cadavre de son père, prise par elle-même et sous toutes les coutures d'un costume beige ou ocre, couleur de vomi.
Ces visions diffèrent, parfois se contredisent, elles sont autant d'éclats épars don le rassemblement ou la compilation n'apportent rien.
Un matin je me suis levée et j'ai pensé qu'il fallait que j'écrive, dussé-je m'attacher à ma chaise, et que je continue de chercher, même dans la certitude de ne jamais trouver de réponse. Le livre, peut-être, ne serait rien d'autre que ça, le récit de cette quête, contiendrait en lui-même sa propre genèse, ses errances narratives, ses tentatives inachevées. Mais il serait cet élan, de moi vers elle, hésitant et inabouti.
La rencontre de Lucile et de Gabriel reste à mes yeux la rencontre de deux grandes souffrances, et contrairement à la loi mathématique qui veut que la multiplication de deux nombres négatifs produise un nombre positif, de cette rencontre ont surgi la violence et le désarroi.Parce que je participe à quelques challenges
Terre du milieu
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"Rien ne s'oppose à la nuit" est un récit sensible, une belle déclaration d'amour filial, qui garde une part de silence... J'ai aimé son styl doux et délicat, un peu moins la position du lecteur-voyeur.
RépondreSupprimerPourquoi la position du lecteur-voyeur?
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